Daniel
Témoignage - Mésothéliome pleural malin
‘Nous, pas nous, c’est impossible. Que ça arrive aux autres, ça fait partie de la vie, mais pas nous!’
C’est la première phrase qui m’est venue à l’esprit, notre monde venait de s’écrouler lorsque j’ai vu la mine dévastée de mon mari en apprenant la nouvelle fatidique que son cancer était incurable avec tout au plus quelques mois à vivre. Tous les murs, le bâtiment même de l’hôpital aurait pu s’effondrer, notre peine prenait tout l’espace, accroché au cou de l’un et l’autre, en gros sanglots. Et moi qui pensais que cela n’arrive qu’aux autres. Erreur, la maladie ne fait aucune ségrégation et elle arrive tel un voleur dans la nuit, sans jamais frapper.
On se pensait dans un mauvais rêve, pire, un cauchemar, lorsque le médecin nous a dit que ce cancer, dont nous n’en avions jamais entendu parler, était probablement dû à l’exposition à l’amiante. ‘Mais voyons, comment est-ce possible?!’ Il nous a mentionné qu’une seule exposition peut être fatale; on respire des fibres invisibles ou presque à l’œil nu et on en meurt, mais bien des années plus tard. Et lorsque que l’on diagnostique la maladie, il est déjà trop tard pour un quelconque traitement ou si peu, prolongeant la durée de vie d’à peine quelques semaines. Ce cancer sournois, insidieux qui se développait à l’ombre de tous doutes de maladie grave, lentement, patiemment, venait de raccourcir la vie de mon chéri et chamboulé celles de notre petite famille; la mienne et celles de nos 2 jeunes ados. Envolé le projet d’érablière fraîchement acquise depuis quelques semaines dont nous faisions des recherches depuis plus de 20 ans pour trouver l’érablière idéale.
Cet amiante, que l’on peut retrouver dans les murs de maisons construites dans les années 1950-1960, dans les infrastructures routières, dans des mélanges de béton pour des fondations de bâtiments résidentiels, commerciaux, scolaires, etc., dans le matériau de certains revêtements extérieurs de maisons résidentielles, qui nous a prévenus que tous ces éléments pouvaient en contenir et leur danger potentiel, mais bien réel sur la santé?
Puis la tristesse fait place à la colère avec le recours au Tribunal du Travail pour faire reconnaître la responsabilité de l’employeur que cette maladie professionnelle a eu, comme proviennent les lieux de travail de mon conjoint, un véritable parcours de David contre Goliath. Alors que j’ai dû faire d’innombrables recherches, me documenter, obtenir très partiellement de l’information de l’ex-employeur de mon conjoint en vue de la préparation de la cause au tribunal, cela fut un véritable parcours du combattant. Il est très difficile, voir presque impossible de prouver avec des faits remontant à plus de 20, 30 ans auparavant.
C’est irréaliste. La cause semble toujours perdue d’avance, toujours en faveur de l’employeur à cause de la lourdeur du fardeau de la preuve. Mais je n’abandonne jamais sans avoir tout essayé. Il faut du courage, de la détermination et beaucoup de résilience pour faire face à un organisme gouvernemental.